Design sculptural : 5 designers qui repoussent les limites de la matière

Refusant de travailler de façon automatique ou de se consacrer à l’art de la réplique, ces 5 designers s’appuient sur des techniques traditionnelles de haute voltige pour repousser les limites de la matière brute.

Benoît Viaene

Sa quête d’un mobilier idéal qui corresponde à ses projets a conduit cet architecte de formation à créer de ses propres mains ce dont il avait besoin. « Après, je ne pouvais plus m’arrêter », confie-t-il. D’abord avec du bois, puis de la pierre, du liège et de la céramique, dans un processus intuitif semé d’essais parfois malheureux.  « Il n’y a pas de règles ou d’influences, pas même de processus défini. C’est le développement du langage de la matière », poursuit l’architecte belge. Les bois utilisés ne sont pas conventionnels : le peuplier, le sipo et le fraké. La patine, à même d’arrondir ses meubles, et le feu – sa façon de le travailler pour sculpter la matière –, sont devenus sa marque de fabrique. « Mon travail est une réaction à la pression de notre vie quotidienne, dans laquelle tout est devenu trop artificiel, trop poli, trop robotisé et trop parfait. » 

benoitviaene.be

© Piet-Albert Goethals

Raphael Navot

Artiste multidisciplinaire, il s’identifie comme un designer non industriel dont le processus de création repose sur l’utilisation de matières premières nobles et de techniques artisanales traditionnelles. Attiré par les textures à la fois brutes et raffinées, il privilégie la pierre, le bois patiné et le béton comme point de départ de ses créations. Tout ce qui pour lui, évoque les êtres tactiles que nous sommes : « Je cherche le moyen de mieux comprendre notre corps, nos habitudes et notre état mental. »  Son premier grand projet à Paris, le club Silencio de David Lynch, en 2011, lui a valu une reconnaissance internationale. Depuis, il crée des espaces, des meubles et des objets en collaboration avec des ébénistes, des forgerons et des tapissiers dont l’esprit, les méthodes et le savoir-faire unique résonnent dans chaque création. Son approche organique et ses formes douces modelées par des mains expertes ont conquis les clients les plus divers. Derniers en date : Friedman Benda et Loro Piana côté mobilier, et le restaurant 39V à Paris. 

raphaelnavot.com

Toni Porto

Depuis son atelier de Madrid, le sculpteur Toni Porto recherche la simplicité dans des pièces en bois d’une incroyable complexité technique. Sa façon de sculpter le bois avec un tour permet d’accélérer le processus jusqu’à devenir une extension de ses mains, voire de sa tête. Le bois encore vert est l’une de ses obsessions « parce que, d’une certaine manière, il est toujours vivant, et il a donc encore son mot à dire dans le processus de création. J’ai un certain contrôle sur le lieu précis où la pièce va s’articuler quand elle sèche, mais parfois la matière surprend, c’est elle qui prend le dessus et la conclusion finale m’échappe », explique le sculpteur. Le buis, le chêne classique et le chêne vert font partie des bois locaux qu’il favorise dans ses créations. Il y apporte parfois des finitions anciennes, presque oubliées. Inspirées du minimalisme et du naturalisme, ses pièces ne donnent pas matière à réfléchir à ses spectateurs, mais plutôt à ressentir. « C’est quelque chose de plus viscéral, de l’ordre de la sensation, davantage un plaisir qu’un message à faire passer. » 

instagram.com/porto_escultor

Morghen Studio

Le duo italien de Morghen Studio, formé par Roberto Tarter et Rodolfo Viola, modèle des sculptures lumineuses qui mixent les contextes et les sensations. Leur petit atelier niché dans le quartier de Bovisa, à Milan, célèbre pour sa chaîne de production, est l’héritier de procédés et de techniques liés à un monde industriel en voie de disparition : « Boire un café avec un vieux tourneur et apprendre quelque chose de lui est un moment précieux », expliquent-ils, réfléchissant à leur degré d’implication dans le secteur. Leurs lampes aux lignes en apparence désordonnées résultent d’essais et d’erreurs qui poussent le matériau à l’extrême. « Entourés d’une infinité de références et de suggestions, nous essayons d’isoler un détail, une innovation, une émotion et d’en trouver une déclinaison dans la forme. » 
morghenstudio.com

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